LA NATIVITÉ DU SEIGNEUR JÉSUS

24 décembre 2022

    Le premier livre de notre Bible, le livre de la Genèse, nous dit que tout a commencé la nuit ! C’est la nuit que Dieu a fait surgir la création, qu’il a lancé l’aventure de l’humanité et la lumière jaillit. « Il y eut un soir, il y eut un matin ! » Chaque naissance est une sortie de la nuit pour venir à la lumière. Comme la nature, nous ne pouvons pas exister sans lumière.

    Mais la lumière ne vient pas que du soleil. Lumière intérieure, elle a sa source en Dieu. C’est lui qui l’a semée dans nos cœurs : lumière de la paix, lumière de l’amour, lumière de la foi, lumière de l’espérance, sans quoi tout meurt. Lumière fragile que nous éteignons trop souvent, croyant que les lumières artificielles sont suffisantes pour traverser l’existence. Nous nous laissons aveugler et conduire par de fausses lumières : ténèbres de la violence et du « toujours plus », de la haine et de l’indifférence, du non-sens et de l’autosuffisance, du désespoir et de l’isolement, ténèbres qui défigurent la création, qui nous défigurent ! Et c’est alors la nuit qui gagne, qui s’étend, en nous, tout autour de nous !

    « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière » annonce le prophète Isaïe, huit siècles avant notre ère. Dieu est lucide et tenace. Il aime sa création et toute l’humanité pour toujours. Il ne peut pas se résigner à ce que nous dépérissions dans les ténèbres. Soulevé par la flamme de l’espérance, à un moment précis de notre histoire, Dieu s’élance, passionnément, au plus près de l’existence des hommes : en Jésus, il se fait l’un de nous, en toute chose, rejetant les ténèbres du péché et diffusant toute sa lumière, en paroles et en actes.

    « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière ». Dans la nuit de Bethléem, où donc est cette grande lumière promise ? Du côté des puissants qui s’agitent pour posséder et gaspiller le monde, pour écraser les pauvres ? Non ! La Lumière éternelle est une lueur fragile qui s’infiltre dans la crèche : Dieu est couché dans une mangeoire. Dans ce petit enfant qui vient de naître couve un feu qui va se répandre petit à petit, embraser les cœurs de chair et fondre les cœurs de pierre, jusqu'à se consumer sur la Croix. En Jésus, Dieu fait flamboyer l’espérance et rallume la flamme de la paix, de l’amour, de la foi. Nouvelle création pour qui veut bien l’accueillir !

    Dans le temps qui est le nôtre, nous avons grand besoin de lumière. Certes, nous pouvons nous étourdir un instant avec des lumières superficielles sans pour autant qu’elles puissent venir à bout de nos ténèbres quotidiennes, des ténèbres qui malmènent notre monde. Mais ce soir, nous sommes sortis dans la nuit, avec nos nuits, comme les bergers, attirés par la Lumière éternelle de Dieu ! Comme les bergers, nous voici près de Jésus, Lumière du monde, pour nous laisser envelopper de sa Lumière. Oui, Jésus est la lumière de la paix et nous la donne : il nous apprend les chemins du dialogue et du pardon. Tant que nous nous parlons, que nous cherchons à retisser la parole, la violence est contenue. Pour soigner la paix, il faut soigner nos paroles. Jésus est la lumière de l’amour et nous la donne : il nous apprend le respect de l’autre, la maîtrise des émotions, le service désintéressé, l’attention aux plus fragiles. Jésus est la lumière de la foi et nous la donne : il nous apprend que notre vie vient d’au-delà de nous, est portée chaque jour par plus grand que nous, par une confiance inouïe, par celui qu’il nomme « Notre Père ». En Jésus, Dieu nous tend la main pour nouer une alliance de vie éternelle. Jésus est la lumière de l’espérance et nous la donne : il nous apprend à relever la tête et nos manches face aux défis de notre vie, de notre monde, de notre Église. Par sa paix, par son amour, par sa foi, quand les nuits épuisent notre courage de vivre, notre courage d’aimer, notre courage de croire, Jésus nous recrée. Naître ne suffit pas pour vivre. Pour vivre, il nous faut renaître chaque jour. Jésus, Lumière éternelle, frappe inlassablement, silencieusement, humblement, à la porte de notre cœur pour restaurer, en nous et avec nous, sa création, pour faire reculer la nuit. Ce n’est plus dans la mangeoire qu’il s’offre à nous mais dans le creux de nos mains, pain rompu, corps livré, vie donnée pour nous donner notre vrai visage.

    Chers amis, frères et sœurs, en ce nouveau Noël, je souhaite que votre vie, avec ses joies et ses élans, mais surtout que les nuits de vos questions et de vos épreuves, les nuits de notre planète et de notre Église, soient étoilées de paix, d’amour, de foi et d’espérance. Comme les bergers quittèrent la crèche, transfigurés par la lumière du Christ Jésus, sortez de cette église, tout lumineux de Dieu !

Bertrand ROY +